Appel à communication

 

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La première édition du colloque international bisannuel Sémiotique et SHS, organisé par l’équipe LERASS-CPST réunissant sémioticiens, linguistes et didacticiens se tiendra du mercredi 18 mai au vendredi 20 mai 2016 à l’université de Toulouse Jean Jaurès, et portera sur la question des types dans les sciences humaines et sociales. Quelles sont les fonctions conférées aux types dans les modalités descriptives et explicatives des différentes sciences humaines et sociales (typologiser-classer dégager des invariants, étudier leur variation, etc.) ? Peut-on, à l’inverse, envisager des théories sans recours à destypes ? Sans remonter jusqu’à la querelle des universaux, on rappellera que la question des types (avec les notions qui lui sont fréquemment associées : concept, catégories, formes, classes, genres, typologies, ...) se pose de manière spécifique dans les sciences humaines et sociales, dans la mesure où la dimension historique de leurs objets sollicite une problématisation spécifique de l’articulation du général et du particulier que l’on ne saurait réduire aux modèles en vigueur dans les sciences de la nature. Cette première édition du colloque entend relancer ces discussions, en suscitant des problématisations épistémologiques et méthodologiques, descriptives et appliquées, et ce dans toutes les disciplines confrontées à ces questions (histoire, archéologie, sémiotique, sociologie, sciences de l’information et de la communication, anthropologie, linguistique, didactique, psychologie, ...).

Sur les plans épistémologique et méthodologique, on aimerait ainsi susciter des réflexions sur les modalités selon lesquelles les diverses sciences humaines et sociales articulent des moments généralisants et particularisants dans leur pratique. Les réflexions de Weber (1904) autour du concept d’idéal-type en sociologie, la reprise par Cassirer (1945) du concept husserlien d’abstraction idéalisante pour décrire le fonctionnement du concept dans les sciences humaines et sociales, les interrogations épistémologiquesdeSaussure (2002) concernant le risque permanent d’hypostase des types construits, sont autant de questionnements réflexifs qui ont vu le jour parallèlement au développement des sciences humaines et sociales, et qui pourraient être approfondis et mis en perspective dans le contexte scientifique actuel . Les interventions pourraient porter, sans exclusive, sur les questions suivantes :

1. Quels formats pour les types ? Types très spécifiés en termes de prototypes, de ressemblances defamilles (Kleiber, 1988) ou formes schématiques sous-spécifiées permettant la variation contextuelle (Culioli, 1991) ou articulation de ces différents formats dans des architectures multiphases (Cadiot, Visetti, 2001, 2006). Certains de ces formats s’imposent-ils préférentiellement selon l’objet d’étude concerné ou bien leur articulation se retrouve-t-elle dans tous les domaines ?

2. Quels modèles de la relation type/occurrence ? Dans le domaine appliqué, la relation type/occurrence a pu être modélisée comme une instanciation (Rastier, 1994), ce qui laissait entière la question de l’émergence du type conçu comme une reconstruction plus ou moins durable à partir des occurrences et non comme un schéma abstrait intemporel. Plus généralement, c’est la question des relations entre modèles ascendants et descendants qui pourra être ici reposée.

3. Quels modèles du changement ? En relation immédiate avec le point précédent, on se posera la question du changement :  selon le format retenu pour construire les types, on pourra en effet retenir des échelles
temporelles très variées du changement.

4 . Quelles sont les conditions d’emploi de la notion de type aux différents niveaux de complexité ? Produits sémiotiques d’actions humaines, les objets culturels sont descriptibles à des niveaux de granularité très variables : les unités de chacun de ces paliers d’analyse sont elles également justiciables d’une approche en termes de typicité et si oui, y a-t-il pour ces différents niveaux des formats préférentiels d’enregistrement de la typicité (cf. point 1) ?

6. Individuation des types et singularisation des œuvres : si l’occurrence d’un type peut être envisagée comme un processus d’individuation, la singularité de l’œuvre ne se prête pas à une telle description : son historicité et son événementialité en font en effet un phénomène que l’on ne peut dédoubler en deux instances sur le modèle type/occurrence – sauf bien entendu pour les œuvres faisant date et qui joueront alors comme modèle.

Sur les plans descriptifs et appliqués, nous attendons des interventions qui, dans leurs champs et méthodologies propres, s’attacheront à mettre en lumière les modalités selon lesquelles il est fait recours à la notion générale de type. On s’attend en particulier à ce que les interventions abordent ici la question des typologies, notament les conditions d’élaboration et d’évolution des typologies. À titre indicatif, on peut évoquer :

1. Les typologies textuelles : les recherches sur les typologies textuelles des vingt dernières années ont pu apparaître comme difficilement conciliables avec les descriptions en termes de genres et de discours, la
fixité des types de texte contrastant avec le caractère perpétuellement évolutif des genres textuels. Quelle articulation et quelle interaction entre ces deux regards sur la textualité peut-on proposer? En particulier, existe-t-il des modèles du changement des types textuels ? Par ailleurs, les nouveaux formats de textualité (hypertextuels notamment) ont-ils provoqué l’apparition de nouveaux types textuels ? Conversement, les genres textuels récemment apparus (SMS, tweet, ...) ont-ils interagi avec les types textuels auparavant décrits ?

2. Typologie des unités sémantiques : la poétique historique, la mythologie, l’anthropologie, la sémiotique textuelle ont décrit une grande variété de types de grandeurs textuelles (fonctions, motifs, thèmes, topoï, ...) se distinguant par des degrés variables de complexité, de généralité et d’abstraction. Compte tenu de la diversité des contextes scientifiques dans lesquels ces notions ont été définies, un état des lieux est nécessaire. On s’intéressera également aux relations que l’on peut établir avec les réflexions sur les
stéréotypes et les clichés en analyse de discours (Amossy, Herschberg-Pierrot, 1997) On se demandera par ailleurs si l’accroissement de la disponibilité et de l’instrumentation des données textuelles permet de
faire apparaître de nouveaux observables.

3. Fonctions des typologies en didactique : Que signifie catégoriser, faire des typologies dans le domaine de la didactique des langues ?

- établissement, par voie comparative, de critères scientifiques permettant la classification du semblable (une même classe) et du dissemblable (classes séparées).

- ces critères découlent des études déjà menées dans le domaine et dans les nombreuses disciplines connexes à la didactique; ils dépendent des raisons pour lesquelles ils sont convoqués (typologie des différentes situations didactiques). En quoi ces critères combinés permettent-ils de mieux
approcher les objets d’étude de la didactique des langues ?
- ces critères débouchent sur des descriptions partielles qui ne rendent aucunement compte de la réalité des agir enseignants et apprenants, mais d’une partie de cette réalité. Ils agiraient donc comme des modèles partiels et permettraient le raisonnement, la comparaison pour déboucher sur une différenciation en classes ou en ressemblance. Quels sont les apports méthodologiques de ces sciences à la recherche en didactique des langues ?

4. fonction des types dans les cultures numériques : On tentera de comprendre comment la notion de type (et les notions connexes) et les opérations de typification (du typage des données à la typologie des usages) se déploient dans les discours et les usages du numérique, entendu comme technique (Simondon), manifestation de la raison computationnelle (Bachimont), et, plus généralement, comme modification du sémiotique, comme milieu modificateur de nos relations sociales (médias socionumériques), de notre rapport au temps et à l’espace (immédiateté, ubiquité, et injonction permanente de la communication permise par l’informatique mobile), à notre corps (Quantified self), et à notre environnement matériel (internet des objets).

- Quelle place prennent la notion de type et les opérations de typification dans l’évolution de l’informatique comme pratique sociale ? Contribuent-elles à la standardisation, à la modélisation formelle qui traversent les évolutions matérielles et logicielles qui fondent le numérique ?
- Quelle place prend l’opération de typologisation dans l’incessant va-et-vient entre concepteurs, distributeurs et usagers des langages, des programmes, des machines?
- Comment qualifier l’évolution terminologique en considérant que les différents termes utilisés pour qualifier les objets et les pratiques du numérique connecté (surfer, naviguer, browse (brouter), sites, réseaux, médias sociaux numériques, etc. sont autant de candidats à la définition de types d’usages ?,
- Comment définir les corrélations de ces types d’usages à des types de pratiques techniques en amont (la généralisation des langages de scripts, la rationalisation des pratiques de webdesign,…), aux propositions matérielles évolutives de l’industrie informatique et à ses inévitables injonctions d’usage, à des utilisateurs qui, par leur comportement online, contribuent à leur redéfinition ?

En somme, en l’abordant par l’entrée typologique, nous essaierons de d’interroger ce que le numérique fait au sémiotique et aux cultures au sein desquelles il se déploie.

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